La mutation n’est pas un état passager à résorber, elle est la condition de la permanence de l’Architecture. Notre époque se caractérise par une condition antagoniste, conflictuelle : celle à la fois d’une injonction au progrès et d’une urgence à préserver.
Qu’est-ce que le « progrès » aujourd’hui ? Quel sens donner au mot « patrimoine » pour les générations futures ? Comment construire l’établissement humain lorsque construire consiste à détruire l’habitat terrien ?
Nous voulons investiguer les conditions possibles d’une réconciliation, lorsque la contradiction devient fertile, fait projet. Autour de la notion centrale de transformation, se fédèrent les enjeux de notre temps : concilier progrès humain et patrimoine terrestre limité. Le domaine Mutations pose comme un préalable que la notion de patrimoine n’implique plus tant la question de la conservation du passé, que celle de la préservation de l’avenir. Les limites en ressources matérielles et énergétiques de notre planète sont désormais connues et changent notre rapport à la matière, aux lieux et donc à l’acte de bâtir.
La notion d’économie de moyens revêt désormais le caractère de la nécessité, d’objectif conceptuel au XXe siècle ; elle constitue aujourd’hui le champ des possibles. Dans cette perspective, le domaine Mutations entend considérer tout territoire habité comme un patrimoine potentiellement à transformer et à restituer transformable pour les générations futures.
La notion de patrimoine a profondément changé depuis son apparition au XIXe siècle. A l’heure où nous réalisons que les ressources de notre monde sont limitées, l’important n’est plus de protéger un nombre très restreint de constructions mais de comprendre en quoi ce dont nous héritons, notre environnement construit tout entier, est un ferment de l’écriture architecturale et urbaine de demain. Nous devons reconsidérer ce qui est précieux, ce qui nous est précieux.
La 1ère démarche qui doit nous animer pour comprendre ce dont nous héritons est le diagnostic. Nous devons emprunter à la rigueur de l’archéologie autant qu’à la puissance créative de la littérature pour comprendre notre monde. L’archéologie pour l’identification des traces, des techniques, et de ce qui fait de la permanence une qualité essentielle de l’architecture. La littérature pour la fiction, la capacité à projeter sur la page blanche, la carte ou le territoire, un récit commun propre à nous emmener vers une nouvelle façon d’habiter le monde.
Le patrimoine, c’est maintenant le respect du futur en même temps que celui du passé.
L’étude typologique est le solfège des architectes ; la question typologique est primordiale. L’architecture est faite de solutions perpétuellement explorées et réinventées par les générations qui se succèdent. Les outils et les capacités techniques changent, les besoins essentiels des hommes restent. Il est primordial pour les étudiants comme pour les chercheurs en architecture de savoir d’où ils viennent et de comprendre qu’ils n’inventent rien mais qu’ils manipulent des typologies éprouvées.